« la caractérisation de l’élément intentionnel des délits de banqueroute par absence de comptabilité ou tenue d’une comptabilité manifestement irrégulière suppose la seule conscience de son auteur de se soustraire à ses obligations comptable légales (…) n’exige pas la preuve que le prévenu a eu la volonté soit d’éviter ou de retarder la constatation de l’état de cessation des paiements, soit d’affecter la consistance de l’actif disponible dans des conditions de nature à placer l’intéressé dans l’impossibilité de faire face au passif exigible »

Cass. crim, 25 nov. 2020, n°19-85.205, F-P+B+I

Aux termes d’un arrêt marquant rendu le 25 novembre 2020, la Cour de cassation a apporté des précisions sur le délit de banqueroute.

Dans cette affaire, des dirigeants d’une société civile immobilière (SCI) ayant fait l’objet d’une procédure de redressement judiciaire ont été poursuivis pour banqueroute par emploi de moyens ruineux, tenue irrégulière de comptabilité et absence de comptabilité, après que l’administrateur provisoire eut transmis au parquet un rapport d’expertise comptable révélant ces irrégularités.

Les prévenus avaient été condamnés en première instance mais relaxés par la cour d’appel, qui, à l’instar du tribunal correctionnel qui avait avancé la date de cessation des paiements à 2012, s’était alignée à la date retenue par le tribunal de grande instance, soit 2013.

La cour d’appel n’avait pas nié l’irrégularité de la tenue de la comptabilité en 2011, puis l’absence de comptabilité de 2012 à 2013, elle avait, cependant, relevé plusieurs circonstances de fait l’empêchant de considérer que ces faits avaient eu lieu « dans le but poursuivi par les prévenus de retarder la constatation de l’état de cessation des paiements ou d’affecter l’actif de la SCI dans des conditions qui allaient la mettre dans l’impossibilité de faire face au passif exigible ».

En outre, après avoir analysé la personnalité les prévenus, ainsi que les antécédents de la société, son respect du plan de redressement et la poursuite ultérieure de son activité, la cour d’appel avait exclu « la thèse selon laquelle ils auraient eu l’intention de maintenir artificiellement l’activité de celle-ci avant la date de cessation des paiements telle que fixée par le tribunal de grande instance ».

Les dirigeants ont alors décidé de former un pourvoi en cassation. Les dirigeants pouvaient-ils être poursuivis bien que les faits allégués avaient été commis avant la date de cessation des paiements ? L’arrêt de relaxe est cassé.

La Cour de cassation a considéré que « si la cessation des paiements, constatée par le jugement d’ouverture d’une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire, est une condition préalable nécessaire à l’exercice de poursuites des chefs de banqueroute par emploi de moyens ruineux, tenue d’une comptabilité manifestement irrégulière ou absence de comptabilité, sa date est sans incidence sur la caractérisation de ces délits, qui peuvent être retenus indifféremment pour des faits commis antérieurement ou postérieurement à la cessation des paiements ».

Etant précisé, qu’aux termes de cet arrêt, la Cour de cassation fait preuve d’une grande sévérité lorsqu’elle constate au visa des articles L.654-2 4° et 5° du Code de commerce et l’article 121-3 du Code pénal que « la caractérisation de l’élément intentionnel des délits de banqueroute par absence de comptabilité ou tenue d’une comptabilité manifestement irrégulière suppose la seule conscience de son auteur de se soustraire à ses obligations comptable légales (…) n’exige pas la preuve que le prévenu a eu la volonté soit d’éviter ou de retarder la constatation de l’état de cessation des paiements, soit d’affecter la consistance de l’actif disponible dans des conditions de nature à placer l’intéressé dans l’impossibilité de faire face au passif exigible ».

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