Lettre d’information n° 26 – Droit immobilier

ACTUALITÉ LÉGISLATIVE ET RÈGLEMENTAIRE

Contrat d’habitation
Décret n° 2015-587 du 29 mai 2015
Défense du droit de propriété
Proposition de loi du 20 mai 2015
Accessibilité
Projet de loi de ratification du 4 février 2015

JURISPRUDENCE

VENTE
Promesse de vente
Condition suspensive sans terme fixe

PROPRIÉTÉ
Syndic
Désignation du syndic
Recours du syndic contre une décision de la CNIL
Droit de propriété
Propriété du sous-sol

BAIL
Bail commercial
Indexation du loyer et révision
Bail d’habitation
Limite au concours du bailleur à la sous-location

AGENT IMMOBILIER
Rémunération
Validité du cumul de rémunération

ACTUALITÉ LÉGISLATIVE ET RÈGLEMENTAIRE

Loi ALUR : contrat d’habitation type

La loi du 6 juillet 1989 modifiée par la loi Alur (loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l’accès au logement et un urbanisme rénové) impose le recours à un contrat type de bail à usage d’habitation. Le décret du 29 mai 2015, pris pour l’application des articles 3, 8-1 et 25-7 de la loi du 6 juillet 1989, précise le champ d’application de cette obligation et définit un contrat type de bail pour la location de logement nu et un autre pour la location de logement meublé. Le texte est par ailleurs complété par une notice relative aux obligations respectives de chaque partie dont le contenu a été fixé par un arrêté du 29 mai 2015. Ce dispositif entre en vigueur le 1er août 2015.
Le recours aux contrats type s’applique aux contrats de location de locaux à usage d’habitation ou à usage mixte professionnel et d’habitation, et qui constituent la résidence principale du preneur à l’exception notamment :

  • des colocations de logement meublé formalisées par la conclusion de plusieurs contrats entre les locataires et le bailleur ;
  • des locations de logements faisant l’objet d’une convention d’aide personnalisée au logement ou d’une aide de l’agence nationale de l’habitat ;
  • des locations de logement appartenant à un organisme d’habitation à loyer modéré ne faisant pas l’objet d’une convention d’aide personnalisée au logement.

De manière générale, ces contrats types contiennent les clauses imposées par la législation mais laissent aux parties une certaine marge de manœuvre leur permettant ainsi de compléter le contrat dans la limite des règles applicables.
Sur le fond, les deux contrats types se décomposent en onze parties intitulées de la manière suivante :

Désignation des parties

2. Objet du contrat : cette rubrique contient une description du logement, la destination des locaux, le cas échéant, la désignation des locaux et équipements accessoires de l’immeuble à usage privatif du locataire, l’énumération des locaux, parties, équipements et accessoires de l’immeuble à usage commun, les équipements d’accès aux technologies de l’information et de la communication.

3. Date de prise d’effet et durée du contrat

4. Conditions financières : cette partie précise notamment :

  • le montant du loyer, le cas échéant, dans les zones tendues, il est fait mention des modalités particulières de fixation de celui-ci ;
  • les charges récupérables ;
  • en cas de colocation, souscription par le bailleur d’une assurance pour le compte des colocataires ;
  • les modalités de paiement du loyer ;
  • le cas échéant, exclusivement lors d’un renouvellement de contrat, les modalités de réévaluation d’un loyer manifestement sous-évalué.

5. Travaux : Il est fait mention, le cas échéant du montant et de la nature des travaux d’amélioration ou de mise en conformité avec les caractéristiques de décence effectués depuis la fin du dernier contrat de location ou depuis le dernier renouvellement, de la majoration du loyer en cours de bail consécutive à des travaux d’amélioration entrepris par le bailleur ou d’acquisitions d’équipements et de la diminution de loyer en cours de bail consécutive à des travaux entrepris par le locataire.

6. Garanties

7. Clause de solidarité

8. Clause résolutoire

9. Honoraires de location : l’article 5 de la loi du 6 juillet 1989 doit être reproduit dans cette rubrique laquelle précise en outre, le détail et la répartition des honoraires.

10. Autres conditions particulières

11. Annexes : cette dernière partie mentionne les pièces jointes au contrat. Sont ainsi visés :

  • l’extrait du règlement concernant la destination de l’immeuble, la jouissance et l’usage des parties privatives et communes, et précisant la quote-part afférente au lot loué dans chacune des catégories de charges
  • le dossier de diagnostic technique
  • la notice d’information relative aux droits et obligations des locataires et des bailleurs
  • l’état des lieux, un inventaire et un état détaillé du mobilier
  • le cas échéant, une autorisation préalable de mise en location
  • le cas échéant, les références aux loyers habituellement constatés dans le voisinage pour des logements comparables.

Chaque partie peut exiger de l’autre, à tout moment, l’établissement d’un contrat conforme. En cas d’absence dans le contrat de location d’une des informations relatives à la surface habitable, aux loyers de référence et au dernier loyer acquitté par le précédent locataire, le locataire peut, dans un délai d’un mois à compter de la prise d’effet du contrat de location, mettre en demeure le bailleur de porter ces informations au bail. A défaut de réponse du bailleur dans le délai d’un mois ou en cas de refus de ce dernier, le locataire peut saisir, dans le délai de trois mois à compter de la mise en demeure, la juridiction compétente afin d’obtenir, le cas échéant, la diminution du loyer.

Protection du droit de propriété – projets

Le 20 mai 2015, des sénateurs ont déposé une proposition de loi tendant à renforcer la protection du droit de propriété. Ce texte, qui a pour objet, la lutte contre l’occupation sans droit ni titre des biens immobiliers s’articule autour de deux axes. Il vise d’une part à prévenir ces situations et entend d’autre part, organiser une procédure en cas d’occupation sans droit, ni titre.
Le texte prévoit ainsi qu’à compter de son entrée en vigueur, toute occupation d’immeuble à titre gratuit devra faire l’objet d’une convention signée entre l’occupant et le propriétaire de l’immeuble. Cette convention devra contenir l’engagement de l’occupant à entretenir l’immeuble tandis que le propriétaire devra s’engager à fournir un logement digne.
La proposition de loi organise la fin de l’occupation à titre gratuit. Lorsque l’occupant souhaitera quitter les lieux, il devra prévenir le propriétaire par courrier avec accusé de réception et devra quitter l’immeuble dans un délai de trente jours à compter de la date de réception du courrier. De même, lorsque le propriétaire entendra retrouver la jouissance de son bien, il devra prévenir l’occupant par courrier avec accusé de réception, ce dernier disposera alors d’un délai de trente jours à compter de la date d’envoi du courrier pour quitter l’immeuble. Au-delà, le propriétaire pourra engager le dispositif prévu par la loi instituant le droit au logement opposable (loi DALO) étendu à l’occupation sans droit ni titre.
Le deuxième volet de cette proposition de loi consiste essentiellement à étendre à l’occupation sans droit ni titre le dispositif prévu par la loi DALO. Le propriétaire, le locataire ou l’occupant à titre gratuit pourra donc faire appel au préfet afin qu’il mette en demeure l’occupant de quitter les lieux. Cet occupant pourra être condamné à une peine d’un an de prison et de 15.000 euros d’amende. Le texte vise par ailleurs, à instaurer un délai de 48 heures à compter du moment où le propriétaire, le locataire ou l’occupant à titre gratuit constate l’occupation par un tiers, pour faire constater le flagrant délit par un officier de police judiciaire. En cas de constat de l’occupation sans titre par un juge et sur demande du propriétaire, le préfet pourra recourir à la force publique afin de déloger l’occupant sans droit ni titre de cet immeuble.
A noter, dans le même esprit, le dépôt d’une proposition de loi le 28 mai 2015 qui tend à étendre à 7 jours au lieu de 48 heures le délai pendant lequel peut être constaté la flagrance du délit d’occupation illicite du domicile d’autrui (art. L 226-4 du Code pénal, permettant une expulsion immédiate.

Accessibilité

Le projet de loi de ratification de l’ordonnance n° 2014-1090 du 26 septembre 2014 relative à la mise en accessibilité des établissements recevant du public, des transports publics, des bâtiments d’habitation et de la voirie pour les personnes handicapées a été adopté par le Sénat le 2 juin et transmis à l’Assemblée nationale qui a examiné le texte début juillet. L’ordonnance a été ratifiée par la loi n° 2015-988 du 5 août 2015.
Cette ordonnance a visé à actualiser le dispositif instauré par la loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances. A cet égard, il est à noter que l’ordonnance a notamment créé les agendas d’accessibilité pour les établissements recevant du public qui n’étaient pas conformes aux normes d’accessibilité au 31 décembre 2014.

JURISPRUDENCE

Condition suspensive sans terme fixe stipulée dans la promesse de vente

3ème Civ. 20 mai 2015 (n°14-11.851) FS-PB :

Par un acte sous seing privé du 1er novembre 2004, un propriétaire a vendu une parcelle de terre à un acquéreur sous la condition suspensive de l’obtention d’un certificat d’urbanisme. Le 21 mai 2010, l’acquéreur a assigné les héritiers du vendeur afin d’obtenir la réitération de la vente.
La Cour de cassation a confirmé l’arrêt d’appel rejetant cette demande. La cour d’appel avait d’une part relevé que le certificat d’urbanisme n’avait été demandé que plusieurs années après la signature du contrat de vente et postérieurement à l’introduction de l’instance. Elle avait considéré d’autre part, que la stipulation d’une condition suspensive sans terme fixe ne pouvait pour autant conférer à l’obligation un caractère perpétuel. Ainsi, en l’absence d’indexation du prix et de coefficient de revalorisation, la cour avait retenu que les parties avaient eu la commune intention de fixer un délai raisonnable pour la réalisation de la condition suspensive et en avait déduit que la promesse de vente était caduque.

Modalités de désignation du syndic de copropriété

3ème Civ. 15 avril 2015 (n°14-13.255) FS-PB :

Les propriétaires d’un lot dans un immeuble soumis au statut de la copropriété ont assigné le syndicat des copropriétaires ainsi que le syndic en annulation de plusieurs décisions adoptées lors d’une assemblée générale et notamment la décision de nomination du syndic. Cette demande ayant été rejetée par la cour d’appel, les propriétaires ont formé un pourvoi devant la Cour de cassation.
La Cour confirme l’arrêt dans la mesure où, le contrat de syndic n’entrait pas dans les contrats et marchés visés par l’article 21 de la loi du 10 juillet 1965 dans sa rédaction antérieure à la loi du 24 mars 2014. Selon la Cour, la cour d’appel, qui n’a pas fait application de l’article 19-2 du décret du 17 mars 1967 dans sa rédaction issue du décret du 20 avril 2010, en a déduit à bon droit que nonobstant l’absence de mise en concurrence et de consultation du conseil syndical, la décision portant nomination du syndic avait été valablement adoptée.
Il est à noter que depuis l’entrée en vigueur de la loi du 24 mars 2014, la désignation du syndic doit être obligatoirement précédée d’une mise en concurrence. Cette décision a donc une portée limitée dans la mesure où elle n’a vocation à s’appliquer qu’à des situations antérieures à l’entrée en vigueur de la loi Alur.

Recours du syndic contre une décision administrative

CE 6 mai 2015 (n°366713) :

En l’espèce, la présidente de la CNIL avait mis en demeure un syndicat de supprimer la caméra de vidéosurveillance qu’il avait mise dans le poste de travail des agents de sécurité, où se trouvent les écrans de contrôle des caméras placées dans le reste du bâtiment. Constatant que le syndicat ne s’était pas conformé à la mise en demeure, la formation restreinte de la CNIL avait, par délibération, enjoint au responsable du traitement de mettre fin au caractère continu de ce traitement et avait infligé au syndicat une sanction pécuniaire d’un montant de 1 euro assortie d’une sanction complémentaire de publication. Le syndicat des copropriétaires a demandé l’annulation de cette délibération.
Le Conseil d’Etat ne se prononce toutefois pas sur l’annulation de la délibération mais sur la qualité pour agir du syndic, qui a introduit la requête au nom du syndicat. A cet égard, le Conseil rappelle que, dans les cas où une autorisation est requise, le syndic, agissant au nom de la copropriété, est tenu de disposer, sous peine d’irrecevabilité de sa demande, d’une autorisation formelle de l’assemblée générale des copropriétaires pour agir en justice en son nom, habilitation qui doit préciser l’objet et la finalité du contentieux engagé. L’action du syndic n’ayant été précédée d’aucune autorisation formelle préalable, le Conseil considère qu’il ne disposait d’aucune qualité pour agir.

Propriété du sous-sol

3ème Civ. 13 mai 2015 (n°13-27.342) FS-PB :

Dans le tréfonds d’une parcelle appartenant aux demandeurs se trouvait une cave accessible de plain-pied uniquement par le jardin voisin, lequel appartenait aux défendeurs. Estimant que le vendeur du bien appartenant aux demandeurs était titulaire d’un simple droit d’usage sur cette cave qui s’était éteint lors de la vente aux demandeurs, les demandeurs ont assigné leurs voisins et le vendeur pour voir déclarer éteint le droit d’usage de ce dernier et constater l’occupation sans droit ni titre de la cave par les demandeurs. La cour d’appel a considéré que les défendeurs sont propriétaires de la cave.

La Cour de cassation rejette le pourvoi contre cette décision dans la mesure où « la présomption de propriété du dessous au profit des propriétaires du sol n’est susceptible d’être combattue que par la preuve contraire résultant d’un titre, quel qu’en soit le titulaire, ou de la prescription acquisitive ».

Indexation du loyer

3ème Civ. 20 mai 2015 (n°13-27.367) FS-PBRI :

En l’espèce, des locaux commerciaux ont été donné à bail à compter du 2 février 2006. Le 20 avril 2010, le preneur a sollicité la révision du loyer qui, s’élevait après application de la clause d’échelle mobile à la somme de 3 815 439 euros. Le preneur a proposé que le montant du loyer soit fixé à 3 256 335 euros et a saisi le juge des loyers.
Cette demande a été rejetée par la cour d’appel puis par la Cour de cassation. Selon la Cour, à défaut de modification des facteurs locaux de commercialité ayant entraîné par elle-même une variation de plus de 10 % de la valeur locative, il n’y avait pas lieu à révision du loyer sur le fondement de l’article L. 145-38 du code de commerce qui écarte, par dérogation à la règle posée à l’article L. 145-33 du même code, la référence de principe à la valeur locative.

Concours du bailleur à la sous-location

3ème Civ. 15 avril 2015 (n°14-15.976) FS-PB :

En l’espèce, un bailleur avait consenti un bail commercial à une société de gestion hôtelière. Neuf ans après, il avait délivré un congé avec refus de renouvellement en invoquant la conclusion de contrats de sous-location qui étaient selon lui, irréguliers, faute de participation du bailleur aux actes. La cour d’appel avait validé ce congé.
La Cour de cassation a au contraire considéré que lorsque les lieux loués sont destinés à une activité de résidence hôtelière consistant à mettre à disposition de la clientèle outre un hébergement, des prestations de services telles que la location de logements meublés ou garnis, la sous-location étant l’objet même de l’activité du locataire, le bailleur n’a pas à être appelé à concourir aux actes de sous location.

Cumul de rémunération de l’agent immobilier

1ère Civ. 9 avril 2015 (n°14-13.501) FS-PB :

Un agent immobilier s’est vu confier un mandat de recherche portant sur un bien pour lequel il disposait d’un mandat de vendre. Le même jour, le vendeur et l’acheteur ont conclu une promesse de vente assortie d’une rémunération de 20.000 euros de l’agent. La vente est finalement devenue définitive par l’effet d’une nouvelle promesse de vente, conclue suite à la rétractation du vendeur. L’agent immobilier a alors assigné le vendeur et l’acheteur en paiement de dommages-intérêts. La cour d’appel a rejeté cette demande au motif que l’agent immobilier ne peut recevoir à la fois une rémunération du vendeur et de l’acquéreur.
Au visa des articles 6 de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970 et 73 du décret n° 72-678 du 20 juillet 1972, dans leur rédaction applicable en la cause, la Cour de cassation considère qu’aucune disposition de ces textes ne fait obstacle à ce qu’un agent immobilier détienne un mandat d’un vendeur et un mandat d’un acquéreur pour une même opération. Au contraire, selon la Cour, le droit à commission existe pour chacun des mandats dès lors que sont satisfaites les exigences prescrites par ces articles.

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