L’article L113-1 du code des assurances, qui autorise les assureurs à limiter leurs garanties grâce à l’insertion dans leurs contrats d’exclusions, exige que celles-ci soient « formelles et limitées », sous peine de nullité.

Le 20 novembre 2020, la Cour de cassation avait eu l’occasion de rappeler que le seul fait d’avoir à interpréter une clause d’exclusion pour en déterminer l’applicabilité à un dommage, était constitutif d’une contravention à l’article L.113-1 du code des assurances[1].

C’est ainsi qu’elle censura des juges d’appel pour avoir appliqué au préjudice commercial d’un assuré la clause excluant les « dommages indirects (par exemple diminution de l’aptitude à la course, moins-value, dépréciation) [2] », la notion de dommage « indirect » étant imprécise.

Il s’agissait à l’époque d’une simple piqûre de rappel pour les assureurs, qui savent depuis longtemps que leurs clauses d’exclusion doivent être claires, précises et rédigées en caractères très apparents pour être opposables à leurs assurés.

La Cour de cassation vient cependant de franchir une étape supplémentaire qui pourrait avoir des conséquences financières très lourdes pour les assureurs puisque, désormais, il faut mais il suffit qu’une partie quelconque d’une clause d’exclusion soit non-conforme, pour que la clause toute entière soit invalidée !

Dans un arrêt du 17 juin 2021 rendu au visa de l’article L113-1 du Code des assurances, la Cour de cassation a en effet censé une cour d’appel qui avait accepté d’appliquer la clause excluant « les incapacités et invalidités (…) qui résultent de lombalgie, de sciatalgie, dorsalgie, cervicalgie et autre mal au dos », à un assuré souffrant d’hernies discales avec lombo-sciatalgie.

Pour les juges d’appel, le fait que l’expression « autre mal de dos » soit sujette à interprétation était sans conséquence dès lors que la pathologie de l’assuré – lombo-sciatalgie – était expressément visée par la clause litigieuse et qu’il n’était donc pas nécessaire de se soucier du sens à donner à l’expression « mal de dos ».

C’est cette justification qui est renversée par la Cour de cassation, pour qui le seul fait qu’une clause d’exclusion ne soit pas formelle et limitée en toutes ses composantes suffit à justifier la nullité.

Les conséquences risquent d’être lourdes car les contrats d’assurance en vigueur sur le marché française regorgent de clauses qui renvoient à des expressions similaires à celle « autre mal de dos », souvent précédées de la terminologie « par exemple ».

Or, ces formulations, déjà sur la sellette lorsqu’elles étaient invoquées par les assureurs pour justifier un refus de garantie, risquent maintenant, par contagion, d’invalider des clauses toute entières !

Si les assureurs ne manqueront pas, à l’avenir, de mieux « découper » leurs clauses d’exclusion pour éviter cet effet de contagion, ils ne peuvent en revanche pas grand-chose pour les contrats qui sont déjà en place, sauf à tenter d’amender leurs contrats, ce qui parait matériellement difficile réalisable.

[1] Cass., Civ. 2ème, 26 novembre 2020-, pourvoi n°19-16.435

[2] Cour d’appel de Basse-Terre, 25 février 2019, Cybele Rent c/ Ace European Group Ltd et Ace European Group Ltd

Jefferson Larue

Jefferson Larue

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avocat associé

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