Le dispositif d’information des salariés préalablement à toute cession de fonds de commerce, parts sociales, actions ou valeurs mobilières donnant accès à la majorité du capital instauré par la loi relative à l’économie sociale et solidaire et complété par le décret n°2014-1254 du 28 octobre 2014 vise à permettre aux salariés de présenter une offre de reprise en cas de projet de cession. A défaut, il avait été prévu que la cession intervenue en méconnaissance de ces dispositions puisse être annulée à la demande de tout salarié, l’action en nullité se prescrivant par deux mois à compter d’un point de départ alternatif: la date de la publication de la cession de la participation ou la date à laquelle tous les salariés en ont été informés.

Une question prioritaire de constitutionnalité relative à ce dispositif a été formulée.
Le requérant a d’abord prétendu que l’obligation d’information des salariés était en elle-même contraire à la liberté d’entreprendre et au droit de propriété. Le Conseil constitutionnel, dans sa décision du 17 juillet 2015, a rejeté un tel argument au motif que le dispositif poursuit un objectif d’intérêt général.
Le Conseil constitutionnel a néanmoins considéré qu’ « au regard de l’objet de l’obligation d’information » et « des conséquences de la nullité de la cession pour le cédant et le cessionnaire », cette action en nullité portait une atteinte manifestement disproportionnée à la liberté d’entreprendre et a déclaré que les quatrième et cinquième alinéas de l’article L. 23-10-1 et les troisième et quatrième alinéas de l’article L. 23-10-7 du Code de commerce, applicables en cas de cession de société, n’étaient pas conformes à la Constitution. Le Conseil constitutionnel a précisé que sa décision prenait effet à compter de la publication de la décision et qu’elle était applicable à toutes les affaires non jugées définitivement à cette date.
La portée de cette décision devrait être limitée par l’entrée en vigueur de l’article 204 de la loi Macron, dans la mesure où cet article remplace la sanction de nullité de la vente, par une amende civile dont le montant ne peut excéder 2 % du montant de la vente.
Dans l’attente de l’entrée en vigueur de ce texte, il faut retenir que le non-respect du dispositif d’information des salariés applicable en cas de vente de parts sociales, actions ou valeurs mobilières n’est plus sanctionné par la nullité. En revanche, cette sanction reste applicable, en l’état, en cas de cession de fonds de commerce dans la mesure où celle-ci est prévue par les articles L.141-23 et L.141-28 du Code de commerce, lesquels n’ont pas fait l’objet de l’objet du même recours devant le Conseil constitutionnel.
Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la loi Macron, à une date fixée par décret, le dispositif d’information sera modifié. L’information des salariés aura vocation à porter non seulement sur les conditions juridiques de la reprise d’une entreprise par les salariés, sur ses avantages et ses difficultés, ainsi que sur les dispositifs d’aide dont ils peuvent bénéficier mais également sur les orientations générales de l’entreprise relatives à la détention de son capital, notamment sur le contexte et les conditions d’une cession de celle-ci et, le cas échéant, sur le contexte et les conditions d’un changement capitalistique substantiel.
Le dispositif ne sera toutefois pas applicable si, au cours des douze mois qui précèdent la vente, celle-ci a déjà donné lieu à une information des salariés.
Il appartiendra à l’exploitant ou au chef d’entreprise, lorsque ceux-ci ne sont pas les propriétaires des droits sociaux, de notifier à ces derniers toute offre d’achat présentée par des salariés.
La parution du décret précité aura enfin pour effet de mettre fin à l’application de la sanction de la nullité en cas de non-respect du dispositif pour les cessions de fonds de commerce.

Morgan Jamet

Morgan Jamet

auteur

avocat associé

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