La simplification de la procédure civile est un des axes essentiels de la loi du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice.

Cette réforme de la procédure civile a pour objectif d’être, pour le justiciable, synonyme de rapidité, simplicité et lisibilité avec notamment :

– Un juge à l’office recentré,

– Des modes alternatifs de règlement des différends plus attractifs ;

– Plus de droits fondamentaux pour les personnes qui divorcent et les majeurs protégés ;

– L’adaptation de la justice au numérique.

Elle doit être lue à l’aune de la nouvelle organisation judiciaire qui entrera également en vigueur le 1er janvier 2020.

En effet, la loi du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice prévoit également la fusion du tribunal d’instance et du tribunal de grande instance dans un tribunal judiciaire aux compétences étendues (lorsque le TGI et le TI sont situés dans la même ville) et créée les chambres de proximité dénommées « tribunaux de proximité » (lorsque le TI n’est pas situé dans la même ville que le TGI).

Ce volet dit « territorial » de la loi pour la réforme de la justice a déjà donné lieu à la publication de trois décrets, publiés le 1er septembre 2019, qui modifient notamment le Code de l’organisation judiciaire et dont les dispositions entreront, pour l’essentiel, en vigueur le 1er janvier 2020.

Dans l’attente de la publication du décret d’application concernant le volet dit « civil » de la loi justice, prévue au mois de novembre 2019, un panorama des changements probables à prévoir à compter du 1er janvier 2020 peut d’ores et déjà être présenté :

  • L’extension de la représentation obligatoire
  • L’unification des modes de saisine et la disparition de la déclaration au greffe
  • Le recours au MARD préalable avant toute saisine
  • L’extension des pouvoirs du juge de la mise en état aux fins de non-recevoir
  • L’exécution provisoire de droit des décisions de justice

L’extension de la représentation par avocat obligatoire

La représentation par avocat devient obligatoire par principe devant le Tribunal judiciaire (article 760 du CPC), sans distinction entre les procédures écrites et orales, alors qu’elle ne l’était que par exception devant le tribunal de grande instance.

Dès lors, la représentation par avocat devient obligatoire, dans les procédures spécifiques suivantes :

– de référé lorsque le montant des intérêts en jeu est supérieur à 10.000 euros ;

– devant le tribunal de commerce lorsque le montant des intérêts en jeu est supérieur à 10 000 euros, y compris en référé ;

– de révision des loyers commerciaux;

– devant le juge de l’exécution lorsque le montant des intérêts en jeu est supérieur à 10 000 euros;

– en matière familiale, dans la procédure de divorce y compris dans l’audience d’orientation et de mesures provisoires, dans la procédure d’absence, de révision de la prestation compensatoire et de délégation et retrait total partiel de l’autorité parentale ou de délaissement parental;

– en matière d’expropriation;

– dans les procédures fiscales devant les juridictions civiles.

Dans ces matières, même si certaines d’entre elles répondent du régime des procédures orales, il conviendra de constituer avocat dans l’acte introductif d’instance ou en défense, à défaut, en demande comme en défense il s’agira d’un cas de nullité de fond.

Dans ces matières, restent toutefois sans représentation obligatoire :

– L’expulsion;

– Les saisies des rémunérations ;

– Les procédures collectives

– Les matières relevant du juge des contentieux de la protection

L’unification des modes de saisine (articles 54 à 59 CPC)

La saisine de la juridiction est simplifiée puisque ne devraient être conservés que deux des cinq modes de saisine existants aujourd’hui : l’assignation et la requête (la déclaration au greffe étant réservée à l’appel).

De nouvelles mentions obligatoires devront également être renseignées : adresse électronique, numéro de téléphone du demandeur ou de son avocat, le lieu, jour et heure de l’audience, la liste des pièces sur lesquelles la demande est fondée.

Le nouvel article 56 du Code de procédure civile ne devrait plus obliger à justifier dans l’assignation des tentatives amiables dès lors qu’il ne s’agit pas d’une procédure pour laquelle les tentatives de modes alternatifs de règlement des différends (« MARD ») sont obligatoires. Il convient toutefois de rappeler que le juge a reçu un pouvoir général d’enjoindre de rencontrer un médiateur en vertu de l’article 22-1 de la loi du 8 février 1995.

Le mécanisme de prise de date obtenue à terme par voie numérique

La date sera communiquée par le greffe par tout moyen (article 751 CPC).

Le recours préalable obligatoire aux MARD

Le décret devrait préciser les cas dans lesquels le demandeur doit justifier, avant de saisir la juridiction, d’une tentative de conciliation, de médiation ou de convention de procédure participative ainsi que les notions de conflits de voisinage, de délai raisonnable et de motif légitime et fixer le seuil en deçà duquel cette tentative est obligatoire à la somme de 5.000 euros (articles 819 et 819-1 CPC).

L’assignation devra comporter, à peine de nullité dans ces cas précis, l’obligation de mentionner les diligences entreprises pour parvenir à une résolution amiable du litige.

L’extension des pouvoirs du juge de la mise en état (JME) – les fins de non-recevoir

Le juge de la mise en état pourra désormais statuer sur toutes les fins de non-recevoir, en renvoyant à la formation collégiale de la mise en état les fins de non-recevoir qui nécessiteraient qu’une question de fond soit tranchée (nouvel article 789 remplaçant l’ancien article 771 du CPC).

La possibilité offerte d’opter pour une procédure sans audience

Devant le Tribunal judiciaire, dans les affaires relevant de la procédure écrite (article 778 CPC) comme celles relevant de la procédure orale (articles 828 et 829), une procédure sans audience pourra se dérouler à l’initiative des parties avec leur accord exprès.

Cette possibilité sera ouverte après que les parties aient pu faire valoir leurs arguments par écrit et aient pu transmettre leurs pièces. Le Tribunal pourra toujours décider de la tenue d’une audience s’il estime qu’il n’est pas possible de prendre une décision au regard des preuves écrites ou si l’une des parties en fait la demande.

L’autre innovation de la loi de réforme réside dans la possibilité de régler les petits litiges, dont le montant des intérêts en jeu est inférieur à 5.000 euros, de manière intégralement dématérialisée, autrement dit sans audience et complètement en ligne. Cette possibilité sera ouverte, au plus tard, au 1er janvier 2022.

L’exécution provisoire de droit des décisions de justice (article 514 CPC)

L’appel et l’opposition ne seront plus des recours suspensifs (article 536-1 CPC).

L’exécution provisoire de droit devient le principe sauf si le juge décide d’écarter l’exécution provisoire en tout ou partie, s’il estime qu’elle est incompatible avec la nature de l’affaire ou qu’elle risque d’entraîner des conséquences manifestement excessive, d’office ou à la demande des parties, par décision spécialement motivée.

Il conviendra donc demander dès la première instance qu’elle soit écartée, à défaut de quoi toute demande d’arrêt devant le Premier Président de la Cour d’appel saisie d’un appel sera irrecevable.

L’exécution provisoire de droit restera l’exception dans les cas prévus par la loi et notamment pour les décisions rendues par le juge aux affaires familiales qui mettent fin à l’instance (le divorce, les régimes matrimoniaux, les indivisions pacs, les liquidations et partages des époux, la prestation compensatoire, les décisions en matière de tutelle des mineurs), l’appel concernant l’annulation et la rectification des actes de l’état civil, les procédures relatives au prénom et la modification de la mention du sexe dans les actes de l’état civil et en matière de filiation.

Les décisions rendues par le tribunal de commerce bénéficieront également de l’exécution provisoire de droit, sauf en matière de préservation du secret des affaires pour laquelle l’exécution provisoire restera facultative.

Tels sont les changements probables à venir concernant le volet « civil » de cette réforme et qui restent devoir être précisés par le décret d’application dont la publication est prévue au mois de novembre 2019.

Les apports de la loi de réforme de la justice concernant les procédures civiles d’exécution seront également très prochainement évoqués dans un autre post.

Fanny Hurreau

Fanny Hurreau

auteur

avocate associée

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